Au Coq, la villégiature en mode Belle Époque

Sur la côte belge, on peut dire zut au Zoute et miser sur davantage d’authenticité au Coq (De Haan dans la langue de Vondel). Pas de barres d’immeubles qui enlaidissent la digue, mais des constructions à taille plus humaine et une myriade de villas Belle Époque miraculeusement préservées.

Le joli centre du Coq. ©Joli.Voyage
Le joli centre du Coq. ©Joli.Voyage

Le quartier de la Concession représente un véritable petit miracle en regard de l’urbanisme débridé qui a fait des ravages sur les 65 kilomètres du littoral belge. Dans les autres stations de la côte, des immeubles de 10 étages ou plus se dressent sur la digue – ici ils ne dépassent pas quatre étages. Le village est lui aussi préservé. Entre la route Royale et la digue, près de 200 villas Belle Époque sont conservées dans ce quartier de la Concession. Sans concession (du moins quasiment) à la mocheté moderniste.

L'Astoria typiquement Art Déco. ©Joli.Voyage
L’Astoria typiquement Art déco. ©Joli.Voyage

Quel bonheur de déambuler dans les rues et d’admirer ces trésors début de siècle! On s’amuse à parcourir les noms de ces bijoux de style anglo-normand, avec aussi des touches Art déco, notamment sur l’hôtel Astoria ou sur le Bellevue, magnifiquement restauré. Cela forme un ensemble harmonieux, un cadre de village idyllique, où l’on s’attendrait presque à entendre le « Bonjour chez vous » de la série mythique « Le Prisonnier ». Sauf qu’ici on ne veut pas s’évader. Au contraire, l’évasion est sur place.

La station du tram, comme au siècle passé. ©Joli.Voyage
La station du tram, comme au siècle passé. ©Joli.Voyage

Les rues de la Concession rayonnent autour de la Potinière, suivant un plan de l’architecte et urbaniste allemand Josef Stübben pour le compte du roi Léopold II. Le souverain souhaitait y établir une extension verte d’Ostende à l’usage de la riche bourgeoisie. On  doit aussi à Léopold II le Royal Ostend Golf Club (en réalité sur le territoire du Coq), le tout premier 18 trous du Royaume et sans doute un des plus beaux.

Sur les hauteurs du Coq. ©Joli.Voyage
Sur les hauteurs du Coq. ©Joli.Voyage
Albert Einstein vous attend au bout de la Normandielaan ©Joli.Voyage
Albert Einstein vous attend au bout de la Normandielaan ©Joli.Voyage

Des promenades sont proposées par l’office de tourisme pour mieux découvrir le patrimoine local: un e-book iDeHaan, des visites guidées ou encore un plan « Sur les pas d’Einstein« . Le savant est au Coq ce que Marcel Proust est à Cabourg: un personnage historique qui fait le lien avec une époque et tout un milieu privilégié qui fréquentait alors la station. Pas de Grand Hôtel pour Albert Einstein, mais  une modeste maison de vacances, au numéro 5 de la Shakespearelaan, où il passa six mois, en 1933. On peut poser à côté du brillant savant, du moins de sa statue, en essayant de ne pas paraître trop bête (une statue sur un banc au bout de la Normandielaan).

La plus longue plage

La mer n’est jamais loin au Coq. La station offre sans doute la plus belle plage du littoral belge, la plus longue et la plus préservée. Sur la digue subsistent encore des villas, et les immeubles affichent une hauteur modeste, laissant passer le soleil à toute heure. Une harmonie est respectée sur la plage, les loueurs de transats apportant une rigueur géographique et un savant alignement chromatique (à chaque loueur ses couleurs). Dès qu’on s’éloigne de la digue, ce sont de vastes dunes de part et d’autre, vers Wenduine ou vers Bredene. On y retrouve la même impression de liberté qu’aux extrémités du littoral belge, côté Westhoek (La Panne) ou côté Zwin (plus loin que le Zoute).

La plage vers Bredene, presque sauvage ©Joli.Voyage
La plage vers Bredene, presque sauvage ©Joli.Voyage

Cette langue de sable, longue de 12 km au Coq, apporte un fameux bol d’air. Et s’il fait beau et chaud, vous pouvez même vous débarrasser de tous vos effets sur la seule plage nudiste du royaume, sur quelques centaines de mètres à Bredene – nous sommes en Belgique, les seules fois où nous sommes passés par là, le temps était plutôt au coupe-vent, voire à la doudoune… Et le seul être à poil que nous y avons croisé était un malheureux jeune phoque échoué sur la plage – des sauveteurs le protégeaient des chiens, espérant qu’il puisse repartir à la prochaine marée haute.

La plage vers Bredene, presque sauvage ©Joli.Voyage
©Joli.Voyage

Au chant du coq, chaque mercredi, le Dritweg accueille le marché hebdomadaire. Cela met de l’animation, on y trouve de beaux produits de bouche. De charmants commerces bordent cet espace: Soleil vert, un fleuriste qui propose un très beau choix; Point du jour, un joli magasin de décoration; mais aussi un bazar à l’ancienne, comme miraculé des temps anciens, l’indispensable St.-Rita.

L'indispensable bazar Sint-Rita, au Coq ©Joli.Voyage
L’indispensable Bazar St.-Rita, au Coq ©Joli.Voyage
La jolie façade du restaurant Edwart, au Coq ©Joli.Voyage
La jolie façade du restaurant Edwart ©Joli.Voyage

Des restaurants y ont aussi pignon sur rue, dont Edwart, au 1er étage au-dessus d’un magasin de vêtements (la petite carte est souvent tentante, avec ses plats qui mettent en valeur les produits de saison); l’Espérance, à la façade élégante (nous n’avons pas encore franchi la porte) et surtout Markt XI, le restaurant le plus gastronomique des environs (16 sur 20 au Gault & Millau) – on y a dégusté un menu excellentissime: surprenant, millimétré, explosif en goût.

Sortir des sentiers battus

L’office de tourisme du Coq a la bonne idée de promouvoir des balades aux alentours. On s’est rendu au bureau qui se situe dans la station de tram, tout droit sortie de la Belle Epoque – on pourrait se croire au début de siècle dernier. Parmi les bons plans proposés, nous avons opté pour la carte des Duinbossen, la route des dunes boisées. La promenade commence à quelques centaines de mètres de là. On s’aventure sur un sentier qui serpente dans cette réserve naturelle.

En randonnée au milieu des Duinbossen, entre Le Coq et Wenduine ©Joli.Voyage
En randonnée au milieu des Duinbossen, entre Le Coq et Wenduine ©Joli.Voyage

Les Duinbossen s’étendent sur un peu plus de 150 hectares, offrant aux visiteurs des paysages variés, tantôt bois, tantôt clairières, tantôt zones humides, bordant le cordon de dunes entre Le Coq et Wenduine. Polders, bocage, plaine côtière… on passe d’un univers à l’autre en moins d’une heure de promenade. Il ne faut pas se tromper de chemin, certains sentiers sont réservés aux cavaliers (et comme c’est étroit, mieux vaut ne pas tomber nez-à-nez avec un lourd cheval), d’autres aux adeptes du VTT. Nous suivons sagement le chemin pédestre jusqu’au village voisin.

Eetboetiek Poincaré, une excellente adresse pour déjeuner à Wenduine. ©Joli.Voyage
Eetboetiek Poincaré, une excellente adresse pour déjeuner à Wenduine. ©Joli.Voyage
Eetboetiek Poincaré, à Wenduine ©Joli.Voyage
©Joli.Voyage

Arrivés à Wenduine à l’heure du déjeuner, nous avons trouvé une place à l’Eetboetiek Poincaré  – attention, mieux vaut réserver, c’est très vite complet. Il faut dire qu’il y a peu de place, tout au plus une demi-douzaine de tables. Comme son nom l’indique, c’est une boutique – entendez un traiteur. On lorgne les bons petits plats et produits fins qui trônent dans l’étalage, cela sent bon. La partie restaurant est joliment décorée en mode scandinave. L’accueil est charmant et la table excellente: c’est bon, savoureux, fort généreux, avec un menu trois services à 29 euros.

En quittant Wenduine, on passe par la Spioenkop, un petit belvédère qui surplombe les dunes – ce n’est pas encore le Cervin, mais avec ses 31 mètres (dans les meilleurs jours), la dune est la 2e plus haute de la côte belge. Depuis le pavillon blanc au toit rouge, on embrasse le paysage jusqu’à Ostende. Nous retournons justement par la plage vers Le Coq, le visage fouetté par l’air marin, marchant sur le sable dur plus confortable. Près de cinq kilomètres séparent les deux stations. C’est une promenade de santé qu’on peut apprécier côté mer ou côté terre, au milieu des bois.

Où loger?

La bien nommée Bonne Auberge où nous avons logé au Coq. ©Joli.Voyage
La bien nommée Bonne Auberge, où nous avons logé au Coq. ©Joli.Voyage

Nous adorions descendre à l’hôtel La Tourelle, au charme fou. Mais depuis la crise sanitaire, l’établissement a fermé au profit de la seule location d’appartements. Ce qui nous a conduits à une autre adresse et une très belle découverte en l’occurrence: la Bonne Auberge. Cette grande bâtisse, juste derrière l’Astoria, à deux pas de la Potinière, a des airs de petit manoir, toujours dans la veine Belle Époque.

La salle du petit déjeuner à la Bonne Auberge. ©Joli.Voyage
La salle du petit déjeuner à la Bonne Auberge. ©Joli.Voyage

L’établissement a été récemment rénové, avec beaucoup de goût. Les chambres sont très confortables, la salle de bain gigantesque. Le charme de l’ancien a été préservé, à commencer par le salon où l’on peut s’asseoir à toute heure et par la salle à manger où sont servis les petits déjeuners pantagruéliques – le patron fait son pain lui-même, de même que les confitures, et il apporte les œufs frais de son poulailler. On se sent bien dans cet hôtel à taille humaine (douze chambres en tout), un peu comme à la maison (mais une grande maison tout de même!).

Le Grand Hôtel Belle Vue en majesté, au coeur du Coq. ©Joli.Voyage
Le Grand Hôtel Belle Vue en majesté. ©Joli.Voyage

Le Coq ne manque pas de bons hôtels. Parmi les plus réputés figure bien sûr le Grand Hôtel Belle Vue, idéalement situé. Il a fait l’objet  d’une rénovation très soignée. Ses lignes élégantes en font un paquebot de confort – on ne manquera pas de le tester prochainement. A noter également le Manoir Carpe Diem, un Romantik Hôtel luxueux, accroché en hauteur, dans un quartier plus calme. Pour les bourses moins garnies, le Bilderdijk offre un excellent rapport qualité/prix.

La Villa Emilia, B&B que nous aimons beaucoup au Coq. ©Joli.Voyage
La Villa Emilia, B&B que nous aimons beaucoup au Coq. ©Joli.Voyage

On peut aussi opter pour les maisons d’hôtes, assez nombreuses au Coq. Nous avons nos habitudes à la Villa Emilia, maison moderniste située à deux pas de la Potinière. Les propriétaires ont apporté tout le luxe moderne en aménageant les chambres mises en location. Les petits déjeuners sont servis sur des plateaux devant la porte. Service impeccable. Parmi les B&B les plus soignés au Coq figure aussi Zonnehuis, très belle maison au milieu de la Normandielaan. Elle semble tout droit sortie d’un magazine de décoration.

Où manger?

Le restaurant Casanova sur la digue. ©Joli.Voyage
Le restaurant Casanova sur la digue. ©Joli.Voyage

Outre le restaurant gastronomique Markt XI, Edwart situé à deux pas de là, ainsi que Eetboetiek Poincaré déjà cités, quelques bonnes adresses ont retenu notre attention. La digue attire nombre de touristes et des établissements qui ne doivent pas fournir beaucoup d’efforts pour attirer le chaland. Un établissement sort cependant du lot: Casanova (adresse référencée par le Michelin et par Gault & Millau). La déco y est soignée, les tables bien dressées. C’est déjà un bon début. Les assiettes sont fort colorées, les mets savoureux et de saison.

Paname, sur la digue. ©Joli.Voyage
Paname, sur la digue. ©Joli.Voyage

Le chef qui n’hésite pas à venir en salle nous présente ses excuses: son œuf ne peut être accompagné de crevettes grises – la tempête a ruiné toute possibilité de pêche. Les langoustines les remplacent parfaitement. Tout ici est ultra frais, très bien travaillé. Casanova a tout pour nous séduire (en tout bien tout honneur). Parmi les autres établissements sur la digue, on peut citer Mano, pour manger simplement un sandwich aux crevettes grises avec une bière de Bruges – service truculent et ambiance dans la salle – ou Paname, une brasserie plutôt avenante, dont la terrasse ne désemplit pas.

Le cadre avenant de la Villa Julia, au Coq. ©Joli.Voyage
Le cadre avenant de la Villa Julia. ©Joli.Voyage
Moules et frites au Sabor, au Coq. ©Joli.Voyage
Moules et frites au Sabor. ©Joli.Voyage

Dans le village, nous avons aussi eu l’occasion de savourer les bonnes grillades du Bleu chaud – en travaux lors de notre dernier passage, la table du Sabor situé dans la rue de la Station – une petite carte serrée avec d’excellents produits – et la Villa Julia, sympathique demeure familiale. Le restaurant qui occupe le séjour d’une belle demeure porte le nom de la fille des propriétaires, au four et au moulin pour servir les clients. La sole y était parfaite, le chef soigne la présentation de ses plats! On nous également a glissé à l’oreille qu’il y avait une très bonne trattoria au centre du Coq, Mi Gusto (à deux pas du cinéma et de la maison communale) – nous ne manquerons pas d’y succomber lors d’un prochain séjour.

L’établissement qu’on ne manque pour rien au monde à chaque passage dans les environs est situé à l’entrée du Coq, dans le hameau de Klemskerke: le Kruidenmolen (autrement dit le « moulin à épices »). Ses croquettes aux crevettes sont réputées parmi les meilleures de la côte – on y succombe à chaque fois. Les poissons sont tout aussi délicieux. Ce n’est pas pour rien que l’établissement figure comme Bib gourmand au Michelin, le guide mettant en avant l’excellent rapport qualité/prix des lieux.

A noter aussi, un peu plus loin, le Fort Napoléon qui mérite le déplacement. C’est juste un peu avant d’arriver à Ostende. Imaginez une vraie forteresse sur le sable, datant du Premier Empire, comme son nom l’évoque. On peut visiter les lieux mais aussi manger à la brasserie, un resto choc entre murailles et dunes – figurez-vous un morceau de forteresse découpée et remplacée par un rectangle de métal et de verre. La terrasse bénéficie d’une situation exceptionnelle. Après avoir déjeuné très correctement, on peut se promener jusqu’au chenal menant au port d’Ostende.

Sur la longue plage du Coq ©Joli.Voyage
©Joli.Voyage

C’est bien l’avantage du Coq: être proche de tout, car c’est une des stations les plus vite accessibles quand on vient de Bruxelles en voiture. Sa position centrale en fait un atout formidable quand le temps se gâte un rien ou que l’ennui s’installe: on est à deux pas de Bruges, de Knokke ou d’Ostende pour une visite express. Avec le plaisir de retrouver ensuite la quiétude du Coq.

D’autres adresses sur la Belgique ici.

Laisser un commentaire

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.