Le Calvados ne manque pas de bons spots. Caboter entre Honfleur et Cabourg en passant par Deauville et Trouville fait notre bonheur. Houlgate se confirme comme un excellent point de chute pour rayonner dans tout le secteur.

Houlgate, avec sa consonnance anglo-saxonne qui semble sortie d’Outre-Manche, n’est pas assez connue. En même temps, c’est sa chance et cela en fait tout son charme. Il n’y a pas trop de monde et la pression (un rien) moins forte sur l’immobilier a permis au village de conserver son charme d’époque – entendez Belle Époque. Le front de mer est bien préservé: de nombreuses villas s’y dressent encore, un élégant immeuble des années trente, l’ancien Grand hôtel reconverti en résidence, le casino doté d’une salle de cinéma (quel plaisir de sortir d’une séance face à la mer).


L’office de tourisme propose une balade fort amusante à la découverte des plus belles demeures de la station. On se prend au jeu. On ne sait plus où donner de la tête: il y a plus de 300 villas toujours fièrement debout – heureusement, le plan attire l’attention sur les plus remarquables, les plus particulières. La spécificité à Houlgate revient aux épis de faîtage, réalisés en faïence – produits dans la région, à la poterie du Mesnil de Bavent. Ce sont parfois des animaleries entières qui se promènent sur les toits: chats, mouettes, hiboux, cigognes… La balade nous conduit sur les hauteurs de Houlgate, offrant une très belle vue jusqu’à Cabourg, en haut de l’escalier des Cent Marches.


Notre port d’attache à Houlgate est précisément une de ces villas anciennes, la Maison d’Emilie. Construit en 1880, ce charmant petit hôtel propose une dizaine de chambres aussi confortables que joliment décorées. La demeure a gardé tout son charme d’antan – quel régal de prendre le petit déjeuner dans son salon d’époque! On s’y sent bien, très aimablement accueillis par les propriétaires.


Le village est à dimension humaine, avec une rue commerçante bordée de restaurants et de magasins. Des halles gourmandes sont ouvertes, cœur d’un marché hebdomadaire. Parmi les restaurants que nous avons fort appréciés figurent l’Eden, le plus gastronomique (cuisine très soignée et bon rapport qualité-prix), les Halles (juste en face du marché couvert, brasserie conviviale prisée des locaux) ou encore la Terrasse, dans la rue principale (accueil sympathique et bons petits plats). A quelques minutes de Houlgate, nous avons testé aussi Chez le Bougnat, à Dives-sur-Mer. Ce bistrot a l’avantage d’être ouvert sept jours sur sept et de proposer une cuisine de terroir (entendez assez roborative) dans un cadre éclectico-brocanto-foutraque.
Honfleur au fil des personnalités
De Houlgate à Honfleur, il faut compter trois-quarts d’heure de route, mais cela vaut assurément le déplacement. Nous avions déjà séjourné dans cette délicieuse petite ville portuaire, prise d’assaut par des hordes de touristes, dès les beaux jours venus. Nous sommes arrivés tôt, par le haut du village, pour laisser notre voiture un peu à l’écart – mieux vaut abandonner son véhicule et poursuivre à pied.

Honfleur a un charme fou, avec ses ruelles étroites où il est agréable de se perdre. Les murs racontent une riche histoire. Les vitrines mettent en lumière des artistes et des artisans: on y dénombre une septantaine de galeries d’art. La jolie cité, l’estuaire de la Seine, la mer et ses lumières ont inspiré de nombreux talents. Le musée Eugène Boudin en témoigne, comme les maisons Satie – le compositeur est né à Honfleur.

Nous mettons les voiles vers le Vieux Bassin. La lumière qui se pose sur les façades anciennes et colorées, leur reflet dans l’eau donnent une image de carte postale. On a beau la connaître par cœur, on ne s’en lasse pas. Mieux vaut y aller tôt, quand il n’y a pas trop de visiteurs. Et éviter aussi les terrasses, collées comme des moules autour du Vieux Bassin: ce sont souvent (mais pas toujours) des attrape-touristes.

On croise aussi du monde dans l’église Sainte-Catherine. Il faut dire que c’est l’autre point d’attraction de la localité. Cet édifice qui date du XVe siècle est très particulier, avec son clocher séparé de la nef pour éviter tout risque d’incendie – la nef est entièrement en bois, érigée comme une coque de navire. Une autre église de Honfleur nous a beaucoup séduits: la chapelle Notre-Dame de Grâce. Elle se mérite, puisqu’elle est située sur les hauteurs – il faut grimper une longue route en pente pour y parvenir. Une belle surprise attend ses visiteurs: les plafonds de l’église sont ornés de nombreuses maquettes de bateau et d’ex-voto. Une fête des marins s’y déroule chaque année.


Honfleur ne manque pas de bonnes tables: le Bréard, où nous avions déjà excellemment dîné, mais aussi le Sa.qua.na (actuellement en travaux), la Lieutenance et les Impressionnistes, la table de « La Ferme Saint-Siméon ». Pour déjeuner, nous avons jeté notre dévolu sur une adresse toute simple dont nous raffolons pour son atmosphère si particulière. On mange au milieu d’une petite boutique de brocante, accueilli par Laurence qui donne son nom à l’établissement. Elle y reçoit le visiteur comme à la maison et mitonne de bons petits plats dans sa cuisine mouchoir de poche.

En sortant de table, nous nous sommes offert une balade le long de l’eau jusqu’à la plage de Honfleur, à l’embouchure de la Seine. On prend un bon bol d’air avant de regagner la ville par le jardin des personnalités, un magnifique parc planté entre terre et mer. On y voit passer les cargos qui filent sur Le Havre. Honfleur a eu la bonne idée d’y mettre à l’honneur ceux et celles qui ont porté la renommée des lieux: on y croise les bustes d’Eugène Boudin, Alphonse Allais, Charles Baudelaire ou encore Lucie Delarue Mardrus, sertis dans des écrins de verdure. Voilà une belle façon de se promener dans l’histoire.

Pour loger à Honfleur, on ne peut que recommander la Maison de Lucie, hôtel charmant, magnifiquement décoré, où nous avons logé lors d’un précédent séjour. L’offre hôtelière est pléthorique. On peut retenir aussi le Saint-Délis, récemment ouvert, petit frère de la prestigieuse Ferme Saint Siméon, ou encore les Maisons de Léa. Après une longue journée à Honfleur, nous sommes heureux de regagner nos pénates, plus au calme, à Houlgate.
Deauville rime avec shopping, mais pas que…

Cha bada bada… Nous sommes venus à Deauville en Volvo, pas en Ford Mustang hélas. Et nous ne nous sommes pas garés sur la plage, mais en rue. La ville mérite bien son surnom de 21e arrondissement de Paris, avec ses magasins de luxe, ses ors et ses paillettes. Il n’empêche que la promenade des planches, avec ses cabines un peu décaties, reste pleine de charme, le long de cette plage où fut tourné le film de Lelouch, « Un homme et une femme ».

C’est un « Zoute » de Normandie, mais en plus authentique, plus distingué, au patrimoine davantage préservé. La culture y a droit de cité. Il y a, bien sûr, le festival du film américain. Depuis peu, un centre culturel flambant neuf brille au cœur de la cité: les Franciscaines ont été aménagées dans l’ancien couvent. La reconversion architecturale est spectaculaire et attire du monde. Dont nous-même, tels des papillons éblouis par les lumières de la culture.


On peut s’installer dans le patio ou dans les coins salon, en coursives, pour y lire la presse, parcourir les rayons de livres, musiques et films de la médiathèque, au travers de thèmes comme le cinéma ou les chevaux (le champ de course n’est pas très loin). Des œuvres jalonnent l’espace, des expositions temporaires y sont proposées. Quel merveilleux temple pour le savoir et la culture! On aimerait y passer des heures. On voudrait le même à côté de chez soi !


Le midi, nous avons déjeuné dans un établissement qui a pignon ou plutôt colombages sur rue: le restaurant La Flambée. L’établissement assez cossu – on est tout de même à Deauville – propose des menus attractifs. Nous n’avons pas succombé aux viandes ou aux poissons grillés, spécialités de la maison – on y flambe vraiment – mais aux suggestions du jour: ce fut excellent.

Deauville ne manque pas de bonnes adresses, de même que Trouville, juste à côté, où nous avons repéré le rooftop au-dessus de la piscine municipale (la « Cabane perchée« ) -–surtout pour sa situation au-dessus de la plage – et puis le 1912, le restaurant très avenant des Thermes marins de Trouville. On y reviendra!

Cabourg, à la recherche du temps retrouvé

La digue de Cabourg conserve beaucoup de charme. On oublie vite les immeubles modernes pour admirer les villas Belle Époque et le Grand Hôtel, toujours en activité, où séjourna Marcel Proust. Ce dernier a inspiré un très joli musée, ouvert tout récemment dans le quartier résidentiel: la Villa du Temps retrouvé. Sa visite nous a régalés!


La splendide demeure a été restaurée avec soin. Il n’y est pas seulement question de Marcel Proust, mais de son temps, la Belle Époque, et de la région, la Normandie sublimée par les peintres. Les œuvres d’art fleurissent sur les murs, prêtées par d’autres musées. Mais ce qui séduit beaucoup ici, c’est l’expérience immersive: on peut s’installer au salon ou derrière le piano pour en jouer. Les cadres photos s’animent en vidéo, le phonographe joue des airs d’antan. On replonge dans ce riche passé. Marcel Proust occupe bien sûr une place de choix dans la bibliothèque de la villa, où l’on peut admirer les ratures du manuscrit de la Recherche du temps perdu.


La faim nous tenaillant, nous avons remis le cap sur la digue pour déjeuner, succombant à la situation d’un établissement avec vue sur mer, le bien-nommé Beau-Site. Une étape touristique, mais assez honnête. Parmi les spécialités de l’endroit, le homard, frites, mayonnaise, que les locaux avalent avec appétit. Nous avons profité de la pleine saison des moules de Bouchot pour en commander.

Une petite balade digestive s’impose. Cabourg n’est pas qu’une station balnéaire où l’on tient salon, c’est aussi un morceau de ville posé sur la plage. Nous nous sommes échappés sur la pointe de Cabourg, parmi ces dunes qui filent vers Houlgate, cognant contre l’estuaire de la Dives. Le vent, le sable, les oyats et la mer à côté nous enivrent quelque peu, comme un Calvados peut conclure un bon repas.

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